mardi 16 juin 2009

St-Jean Batiste: La peur en soi

Tu es poussière et tu retourneras poussière a-t-on tenté de me convaincre jadis dans ma jeunesse. Déjà à l’âge de 7 ans, je réalisais que les croyances cachaient une partie de la vérité. N’empêche qu’il est vrai que la vie n’est qu’un perpétuel recommencement. Serait-ce ce qui explique que l’humain n’évolue qu’à pas de tortue? Et ça, lorsqu’il ne régresse pas! À l’approche de la journée du drapeau bleu et blanc, les derniers événements autour de la langue laissent croire que le leadership est prisonnier de la même dynamique.

En février 2008 dans Langues Fourchues, je parlais justement des croyances, des dogmes, de la frontière entre le rationnel et l’irrationnel, de la frontière où les arguments deviennent croyances. Aujourd’hui avec la controverse autour d’un 40 minutes de chanson anglaise dans un spectacle de 6 heures, je comprends que le fond du problème relève des peurs individuelles, les peurs intrinsèques, les peurs en soi.

Le 40 minutes en 6 heures, je parle bien entendu du spectacle alternatif de la Fête nationale nommément, L’autre St-Jean. Aujourd’hui au moment où j’écris ces lignes, il semblerait que c’est un administrateur de l’Association Culturelle Louis-Hébert (ACLH) – l’organisme qui présente le spectacle L’autre St-Jean – qui a parlé devant les médias alors qu’il n’avait pas ce mandat. C’est lui qui a dit que les groupes anglophones seraient retirés de la programmation. C’était comment dire, disons, la bougie d’allumage.

«On avait peur des manifestations» contre les groupes anglophones expliquait ACLH dans un communiqué de presse. «Que des groupes anglophones chantent en anglais à la Fête nationale, c’est problématique. Ils font partie de la nation québécoise, oui. Mais la langue officielle, c’est le français.», expliquait Marc Laviolette (Source: La Presse) Et combien d’autres déclarations pro «Le Québec aux Québécois»? Et d’autres encore pour dénoncer cette fermeture d’esprit.

La peur est le frein de l’évolution. C’est important d’en prendre conscience lorsqu’on veut exercer du leadership. Parce qu’un leader ne peut pas avoir peur. Il ne peut pas avoir peur de l’assimilation, ni peur des manifestations, ni peur des anglophones. Un leader ne peut pas avoir peur de l’autre. Parce que lorsqu’on a peur, notre jugement se détériore. Lorsque notre jugement se détériore, parfois ça nous mène à l’Appropriation comme je l’expliquais l’an passé juste après la même Fête nationale.

Pourquoi le Québec n’est-il toujours pas indépendant? Peut-être parce les soi-disant leaders de la cause alimentent la peur au lieu d’alimenter l’espoir. Lorsqu’on alimente la peur de l’autre, lorsqu’on alimente l’assimilation de l’autre par peur d’être assimilé, on ne fait que diviser au lieu de mobiliser.

Que fait un enfant lorsqu’il a peur? Il se recroqueville sur lui-même. La peur, c’est le repli sur soi. Ce n’est pas ça du leadership. Lorsqu’il est question de leadership, on ne peut pas avoir peur d’entendre 40 minutes de chanson anglophone dans un spectacle de 6 heures.

Lorsqu’il est question de leadership, on ne peut pas demander aux gens de parler français ou de se taire. Lorsqu’il est question de leadership, on ne peut pas demander à l’autre d’être à condition d’être comme «nous». Lorsqu’il est question de leadership, on ne peut pas… on ne peut pas… on ne peut pas avoir la peur en soi.

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