jeudi 30 juillet 2009

Earl Jones: Fraude et leadership

Il me serait difficile de ne pas parler d’Earl Jones. D’une part, toute la planète médiatique a les projecteurs tournés vers lui. D’autre part, cet individu a fait preuve de leadership. Autrement dit, un plus un fait deux. L’actualité vue sous l’angle du leadership! Avez-vous dit leadership?

Je sais que plusieurs ne seront pas d’accord avec moi lorsque je dis que Jones a fait preuve de leadership. Ce qui ne me surprend pas. Plusieurs voient le leadership comme quelque chose de bien et de fantastique. C’est une conception erronée de ce phénomène d’influence.

Peu importe les livres, la majorité présente le leader comme quelqu’un qui fait de belles choses autour de lui. Qu’on se le tienne pour dit. Un leader n’est pas nécessairement un bienfaiteur.

Le leadership est l’art de faire faire aux autres ce qu’ils n’auraient fait d’eux-mêmes. Earl Jones a mobilisé une centaine de personnes autour de lui. Il a inspiré les gens afin qu’ils lui accordent leur confiance. Earl Jones représentait un homme fiable et attentionné aux yeux de plusieurs. Je suis persuadé qu’il aurait été en mesure de mobiliser son entourage dans des projets qui dépassent l’imagination. Mais ce n’est pas ce qui l’intéressait. Seul l’argent avait un attrait à ses yeux.

Lors d’un reportage à la télé, j’ai été surpris de voir une victime du malfrat l’interpeller par son prénom. "Je suis contente de voir qu’Earl s’est manifesté. Maintenant il va nous dire ce qui s’est passé". Elle et sa famille ont perdu un peu plus d’un million de dollars. Earl allait maintenant leur dire la vérité. Selon moi, un beau cas de psychologie.

Le cas d’une victime sous l’emprise d’un gourou. Le cas d’une victime incapable d’exprimer de la haine face à son bourreau. Le cas d’une victime incapable de se distancier de l’abuseur. "Earl va nous dire ce qui s’est passé".

La majorité des victimes connaissaient Jones depuis de nombreuses années. Certaines depuis plus de 30 ans. Selon la dame, il allait maintenant s’expliquer. Il allait maintenant dire la vérité.

Je ne suis pas un expert en psychologie. Mais je sais que parfois, des victimes se protègent des événements par le déni. Plusieurs victimes de Jones ont perdu des centaines de milliers de dollars. Pour d’autres, les pertes familiales avoisinent le million ou le dépassent. Pour la majorité, c’est l’ensemble des économies de retraite qui sont disparues en fumée. Je ne peux imaginer le ressenti tellement il doit être grand. Sentiment de s’être fait avoir, de s’être trompé, d’avoir été naïf, de crédulité, d’impuissance, de rancœur, de vengeance, d’apitoiement, d’insécurité.

Par où commencer? Par où recommencer? Des victimes risquent de perdre ce qui leur reste faute de pouvoir assumer leurs paiements mensuels qui étaient assurés par leurs revenus de placement. D’autres devront retourner sur le marché du travail à 70 ans. Ce n’est pas de la fraude. Ce sont des drames. Mais "Earl va nous dire ce qui s’est passé".

Faire faire aux autres ce qu’ils n’auraient fait d’eux-mêmes. Il y a du leadership lorsque les gens en viennent à faire ce qu’ils n’auraient fait normalement. Il y a du leadership lorsque les gens font ce qu’ils ne croyaient pas être en mesure de faire.

Généralement, on retire une satisfaction personnelle d’avoir fait quelque chose qu’on ne croyait pas possible au départ. C’est ce qu’on appelle de l’empowerment. Rarement, on préférerait être que dans un mauvais rêve. C’est ce qu’on appelle le déni. "Earl va nous dire ce qui s’est passé". Il ne l’a jamais fait au cours des dernières années. Maintenant il va le faire.

Earl Jones a fait faire aux autres ce qu’ils n’auraient fait normalement. Si Jones avait parlé de ses réelles intentions, personne ne lui aurait confié leurs avoirs. Du moins, ils lui auraient demandé de tout leur rendre avant qu’ils ne commencent à tout dilapider ou avant qu’ils ne cachent le tout dans les paradis fiscaux.

Jones a abusé des gens. Jones a abusé de la confiance des gens. Jones a abusé de l’élément essentiel au leadership: la confiance. Sans confiance, point de leadership.

Dernièrement dans mes chroniques, je mentionne régulièrement que le leadership, c’est en nous que ça commence. Jones ne peut en être un plus bel exemple.

Je ne sais pas depuis combien de temps Jones manigance dans le dos des gens mais une chose est sure, il n’avait pas le bon schème de pensées. Il n’avait pas les bonnes valeurs en lui. C’est là que ça commence le leadership. Ça commence en nous. Ça commence par nos valeurs.

Lorsqu’on aspire au leadership. Il faut savoir qui on est. Il faut savoir ce qui nous motive. Jones était motivé par l’argent. Par l’appât du gain. Pour avoir du leadership, il faut connaître les valeurs qui nous motivent. Pour savoir ce qui nous motive, il faut prendre le temps d’y réfléchir.

Je suis persuadé que Jones ne prenait pas le temps de réfléchir à ses valeurs. Il ne prenait pas le temps de le faire parce que ses valeurs ne devaient plus être en accord avec celles de la société. Les valeurs de Jones devaient tourner autour de l’avarice. C’est à éviter. À éviter car c’est à ce moment que le tout devient fraude et leadership.

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