dimanche 30 mars 2008

Barbarisme

Mon premier est un gardien. Mon second est un sport. Mon troisième est une valeur. Mon tout est une chanson. Qui suis-je?

Pif! Paf! rentre dedans tant pis pour le perdant… Pif! Paf! bien viser c’est le temps de s’amuser!... Pif! Paf! mon Jonathan! Deux doigts d’honneur pour près de 5000 personnes. Ton père doit être fier de toi! Peut-être pas en public. Mais en privée, un fils bourré de testostérone, cela fait dire à certains : "Ça c’est mon gars. On sait de qui il tient! ". Ho là là, dirais-je… Mais si vous me le permettez, je vais laisser les relations père/fils à notre réputé psychanalyste Guy Corneau. Parlons leadership!

Eh oui, il y a matière à leadership dans la maintenant célèbre agression de Jonathan Roy sur le gardien des Saguenéens, Bobby Nadeau. Bien sûr, je pourrais aborder l’événement sous l’angle du manque de leadership. D’autant plus qu’au moment où plusieurs s’indignent de l’événement, les gens concernés n’imposent comme punitions que des expulsions de 2, 5 et 7 matches de hockey.

Houuu! Grosses réprimandes! Croyez-vous vraiment que messieurs Roy ne sont pas morts de rire? Lors d’un match après celui de l’agression, avez-vous vu l’entraineur-adjoint en conférence de presse avec son sourire en coin? Il expliquait qu’il n’avait rien à dire sur le comportement des joueurs sur la glace. "Je ne suis là que pour transmettre au joueur les directives que me communique mon adjoint resté dans la chambre des joueurs", sous-entendu, Patrick Roy. Mort de rire les Remparts au point où l’un de leur joueur, Christophe Poirier, c’est jeté sur la glace comme pour feindre qu’il ne voulait pas se battre lors du quatrième matche de la série. Mort de rire les Remparts et gonflé à bloc. Effectivement, c’est l’un des effets du leadership : l’empowerment!

Comprenez-moi bien, je ne dis pas que je suis d’accord avec l’agression. Je dis simplement qu'elle a permis de canaliser l’énergie des joueurs des Remparts. Jonathan Roy a agi comme un leader conquérant. Il a été sur le territoire de l’adversaire pour le dominer à la vue de tous. Il s’est même permis une autre escarmouche avec un joueur qui venait à la défense de Bobby. Rien ne pouvait l’intimider. Un vrai conquérant. Et pour finir, il a quitté la patinoire avec deux « fingers » à bout de bras. Roy a tout simplement été un catalyseur pour les Remparts. Résultat : les victoires, 6 à 1 et 5 à 1, lors des deux matchs subséquents à l’agression.

C’est ça l’empowerment. Ça fait jaillir l’énergie qui sommeille à l’intérieur des gens. C’est donner confiance afin de surmonter les défis que l’on rencontre sur notre chemin. C’est créer une dynamique où tous et chacun se coordonnent et se complètent pour réussir l’impensable.

Du côté des Saguenéens, on a eu l’effet inverse. Le gardien ne voulait pas se battre. Personnellement, j’approuve entièrement son désir de ne pas le faire. L’idée était très bonne. La façon de le faire, peut-être un peu moins. En fait, Bobby a cherché à se protéger physiquement. Toutefois, il ne s’est pas protégé psychologiquement. En se jetant par terre, il s’est placé en position de soumission. Il a pris la position du perdant. Avec les conséquences que l’on connaît. Les Saguenéens ont été ébranlés par l’événement. Ils ont été conquis, battus, humiliés psychologiquement. D’ailleurs plusieurs disent que Bobby Nadeau a perdu sa confiance. Qu’il n’est plus comme avant. Cela devrait revenir avec le temps du moins, je lui souhaite.

La déconfiture des Saguenéens lors des deux matches suivant l’agression est la conséquence d’un manque de leadership et d’empowerment. Les joueurs n’ont pas été encadrés correctement. Personne n’est intervenu pour canaliser l’énergie positive sous-jacente à l’événement. Parce qu’il y en avait de l’énergie positive, fallait simplement la canaliser. Personne n’est venu dire, Bobby, tu es un exemple pour notre jeunesse. Bobby, tu as fait preuve de courage en refusant de t’abaisser au rang de barbare. Bobby, si tous les hommes étaient comme toi, il y aurait plus de paix et moins de guerre sur notre terre. Personne n’est venu le dire à lui et aux Saguenéens. Personne n’a utilisé l’événement pour faire de l’empowerment. Pendant ce temps-là, les Remparts jubilaient entre eux comme des mal léchés peuvent le faire après un larcin.

L’agression de Jonathan Roy montre de façon exemplaire l’effet que peut avoir l’empowerment. L’événement nous montre que les résultats de l’empowerment ne sont pas toujours ceux souhaités. Pour avoir des organisations performantes, il faut s’assurer d’avoir les bonnes personnes aux bons endroits. Maintes fois aie-je pu voir des gens en mobiliser d’autres en utilisant les mauvaises valeurs. Trop de gens alimentent les comportements et les attitudes négatives dans nos organisations. Trop de gens veulent la paix mais font la guerre. Trop de gens n’osent miser sur les bonnes valeurs en encourageant les bons comportements. Trop de gens se comportent comme de vulgaires voyous à cravate.

L’agression de Jonathan Roy doit nous inciter à nous demander pourquoi est-ce celui qui a le mauvais comportement qui donne aux autres une plus grande confiance en eux-mêmes? Pourquoi est-ce le barbarisme qui a le dessus sur le civisme? Pourquoi ne sommes-nous pas capables de nous libérer de nos comportements barbares issus de nos lointains ancêtres?

Le leadership et l’empowerment ne sont pas si difficiles à maîtriser. Pour y parvenir, l’obstacle à franchir n’est que notre affranchissement face à nos combats intérieurs. Combats entre les valeurs que l’on souhaite et les pulsions primitives que l’on dénonce.

Arrivez-vous à faire de l’empowerment auprès de vos collaborateurs? Oui? Non? Pourquoi? Votre empowerment repose-t-il sur les bonnes valeurs ou alimente-t-il le barbarisme?


01 avril 08 : Hier soir, les Remparts ont gagné le 6e match des huitièmes de finale des séries éliminatoires éliminant ainsi les Saguenéens. Bobby Nadeau n’était toujours pas de retour devant le filet. Avant les séries, les experts prévoyaient une victoire des Saguenéens. Tout cela laisse perplexe mais les Remparts ont gagné leur pari. Le geste gratuit de Jonathan Roy ne cherchait qu’à intimider. Les Remparts voulaient gagner. Ils ont intimidé, ils ont gagné. N’ayez crainte, les partisans seront au rendez-vous pour applaudir leurs idoles. Leadership! Avez-vous dit leadership?

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