dimanche 31 août 2008

Autonomie

Cette semaine, j’ai eu la chance de voir le premier ministre Jean Charest à Sucré Salé. Une émission animée par Guy Jodoin et diffusée à TVA après le bulletin de nouvelles de 18 heures. Chaque jour, l’animateur reçoit une personnalité publique qu’il interviewe sur des sujets touchant leur vie privée. Sa rencontre avec monsieur Charest a donné une belle entrevue instructive sur la vie de nos élus.

Cette émission commence toujours avec un sketch cabotin où l’animateur joue au faire-valoir. Monsieur Charest s’est prêté au jeu en prenant un certain plaisir. C’était de bonne guerre. La mise en scène nous le montrait sous un jour très familier. Comme quoi un premier ministre est capable de faire preuve d’humour à l’occasion.

En aparté, je dois dire que notre premier ministre semble aimer ce genre d’apparition publique. À tout le moins, c’est ce que me laisse croire sa connivence avec notre Infoman Radio-canadien, Jean-René Dufort. Et pour être honnête, j’avoue qu’il nous offre de belles performances.

Après le sketch d’intro, Guy Jodoin a demandé à Monsieur Charest la raison pour laquelle les politiciens se présentent à des émissions de variétés comme la sienne. La réponse allait de soi, ça leur permet de donner une meilleure image de qui ils sont. "C’est très différent des clips que l’on peut voir dans les bulletins de nouvelles.", faisait-il remarquer.

La porte était alors ouverte pour les anecdotes. Comme la fois où il était en voyage en Floride et qu’il a cru qu’il pouvait s’acheter des sous-vêtements. Alors qu’il était à la caisse, il a entendu un commentaire comme quoi il était pour être beau là-dedans! "Un premier ministre n’a plus de vie privée peu importe où il se trouve." Une contrainte de la vie publique que notre premier ministre dit accepter.

Plus tard dans l’émission, Monsieur Charest a expliqué la raison des confrontations politiques lors des campagnes électorales : "Ça permet de faire une démarcation entre un parti et les autres. Ça permet de créer des pôles distincts à partir des valeurs et objectifs des différentes équipes. Ainsi, il devient plus facile pour les électeurs de faire leur choix". Indirectement, monsieur Charest avouait que les bravades que l’on voit jour après jour ne sont que des mises en scène. D’ailleurs, il expliquait que les politiciens se respectent dans leur quotidien car sans cela, rien ne pourrait avancer dans les arcanes politiques.

Honnêtement, cela m’a donné une drôle d’impression. D’un côté, je voyais un homme politique qui voulait se rapprocher des gens en se montrant sous un angle plus humain. De l’autre, je l’entendais dire que les électeurs ont besoin de mises en scène pour comprendre les choix que leur offrent les formations politiques. Comme si nous n’étions pas suffisamment intelligents pour comprendre par nous-mêmes les valeurs et les actions que nous proposent les politiciens.

Des mises en scène… Avec une telle façon de faire, faut-il se surprendre du désengagement de la population envers la chose politique? Faut-il se surprendre du faible taux de participation des électeurs aux élections générales? Poser la question, c’est y répondre!

L’entrevue de Monsieur Charest est un bel exemple de l’un des pièges reliés au pouvoir. Plus on s’élève dans la hiérarchie, qu’elle soit sociale, organisationnelle, politique ou autre, plus le risque augmente pour que l’on croit détenir une vérité à laquelle les autres n’ont pas accès. Plus on s’élève dans la hiérarchie, plus le risque augmente pour que l’on pense que les autres n’ont pas l’aptitude à comprendre ce que l’on fait. Plus on s’élève dans la hiérarchie, plus le risque augmente pour que l’on agisse de façon infantilisante auprès de ceux que l’on côtoie.

À Sucré Salé, monsieur Charest nous a donné un bel exemple de leadership! Avez-vous dit leadership? Vous avez compris, un exemple à ne pas suivre. Si vous voulez réellement mobiliser vos équipes, évitez de croire que vos gens ne peuvent comprendre ce que vous avez à leur dire. Évitez de croire qu’ils n’ont pas suffisamment de jugement pour comprendre les enjeux organisationnels. Évitez de croire que c’est par des mises en scène que vous les amènerez à donner le meilleur d’eux-mêmes.

Depuis la nuit des temps, la connaissance a toujours été un enjeu dans les cercles du pouvoir. Depuis la nuit des temps, plusieurs ont voulu contrôler afin de mieux régner. Si cela est votre approche, oubliez le leadership!

Certes, vos employés n’ont pas tous les diplômes nécessaires pour comprendre les états financiers de l’entreprise. Ni d’ailleurs ceux nécessaires à comprendre les textes de loi ou ceux permettant de faire voler un avion ou trouver la formule du prochain médicament. Vos employés n’ont peut-être pas les diplômes qui font preuve de leurs savoirs. Mais cela ne les empêche pas d’être aptes à comprendre ce que vous avez à leur proposer.

Vos employés n’ont pas besoin de mise en scène pour comprendre et se faire une idée. Ils ont juste besoin que vous leur expliquiez les faits avec intégrité et respect. Pour avoir une entreprise performante, aidez vos employés à grandir. Aidez-les à repousser leurs connaissances afin qu’ils puissent mieux s’épanouir dans leur travail. Aidez-les à comprendre ce que vous avez à leur proposer. Aidez-les à développer, à repousser plus loin, leur autonomie.

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