dimanche 5 avril 2009

Sabia et les techniques de gestion

Comme vous le savez probablement, lorsqu’il est question d’apprendre de nouvelles aptitudes, je préfère et de loin, parler de ce qui ne faut pas faire. En fait, je suis convaincu qu’il est plus efficace d’apprendre le leadership par des exemples à ne pas imiter. À l’instar du frère de l’autre, je dirais même plus, j’ai la certitude que pour changer nos comportements, il est plus efficace de voir ce qu’on ne doit faire que ce qu’on devrait faire. Ceci étant donné qu’il est plus facile de changer nos paradigmes lorsqu’on se reconnaît dans les comportements à proscrire.

Cette semaine, dans les exemples à ne pas imiter, la palme revient à Monsieur Sabia, Michael Sabia. Vendredi dernier, il nous a offert un excellent cours de leadership alors qu’il déambulait sur le trottoir avec son nouveau collègue, Monsieur Tessier. En plus de la pertinence de l’enseignement, je ne peux passer sous silence que le cours était tout à fait gratuit!... Gratuit dans le sens de… Heuuu… Gratuit!.. Gratuit?... D’accord je l’avoue, il m’aurait été difficile de ne pas ajouter une petite touche éditoriale à cette chronique mais je vous le promets, c’est la seule que je ferai cette semaine… Heuuu… Est-ce qu’on peut s’entendre pour aujourd’hui… ou pour ce paragraphe? C’est long une semaine!

S.V.P.! Messieurs Dames. Passons sans plus tarder aux choses sérieuses. Je vous invite donc à regarder immédiatement le très bon reportage vidéo (version texte) d’Annie Dufour de la chaine Argent. Après visionnement, vous trouverez ci-dessous un résumé des apprentissages, le tout évidemment, sous l’angle du leadership! Avez-vous dit leadership?

La technique du coup de vent
Il est fort probable que vous ayez déjà entendu l’expression suivante : il est passé comme un coup de vent. C’est généralement le commentaire des employés lorsque leur supérieur n’est pas accessible. Vous connaissez? Le gestionnaire toujours à la course d’une réunion à l’autre et qui ne prend jamais le temps de répondre aux questions? Souvent, ces gestionnaires sont surpris que les choses n’avancent pas assez vite autour d’eux. Ils sont surpris pourtant, il n’y a rien de surprenant. Les projets n’avancent pas étant donné que les employés n’ont pas de réponse à leurs questions. Conséquemment, ne sachant trop ce qu’ils doivent faire, ils tergiversent. Et l’entreprise passe à côté de ses échéanciers.

Dans la vidéo, on voit très bien que Monsieur Sabia maîtrise de façon exemplaire la technique du coup de vent. De plus, remarquez la distance qu’il impose à la journaliste. Dès le début de leur entretien, il se tient loin d’elle par tous les moyens. Il passe de l’autre côté de la boîte aux lettres. Par la suite, il y a le module de paiement des parcomètres. Les arbres suivent ainsi que les lampadaires, sans oublier la borne-fontaine. Remarquez la journaliste qui doit se faufiler au pas de course, à gauche à droite, entre les obstacles sur son chemin. Observez également sa manipulation du micro pour éviter tout ce qu’elle croise. Jusqu’au prochain coin de rue, presque impossible pour elle de se rapprocher de Michael Sabia. On le comprend, la technique du coup de vent n’est pas l’exemple à suivre pour celui qui aspire au leadership.

La technique de la supériorité
Bien entendu, lorsqu’on monte dans une hiérarchie, sociale, professionnelle ou autre, c’est généralement parce qu’on est compétent (NDLR Vous pouvez d’ailleurs en parler avec d’ex-employés de Bell ou actionnaires de BCE). Dans le monde des affaires, c’est également parce qu’on est intelligent! Du moins, certains le croient ou en viennent à se croire. Pour ces derniers, lorsqu’ils montent dans la hiérarchie, ils comprennent que leurs interlocuteurs n’ont généralement pas les compétences nécessaires pour converser avec eux. C’est à ce moment qu’ils peuvent leur répondre n’importe quoi ou presque. Voyons comment ça se passe.

Annie Dufour : Ça va bien?
Michael Sabia : Oui ça va.
A.D : Où vous en allez?
M.S : Ah oui, juste pour déjeuner avec Monsieur Tessier
Robert Tessier : On va se promener (NDLR : !!!)
A.D : Comment ça se passe jusqu’à maintenant?
M.S : Oh ça va. Ça va. Ça continue oui
A.D. : Est-ce que…
M.S : Nous avons des choses à faire (NDLR On l’espère avec 120 milliards $ à gérer!!!)

L'adage dit qu'une image vaut mille mots. Dans ce cas, quelle est la valeur de cette vidéo?

La technique du faux-semblant
Vous l’avez peut-être compris de vous-même, la technique de la supériorité est très efficace lorsque les questions sont plus ou moins précises. Si la situation se corse par contre, il faut alors passer à une autre technique, celle du faux-semblant. Pour votre apprentissage, Monsieur Sabia nous offre également une démonstration de cette technique.

A.D : Est-ce que… Est-ce que…
A.D : Qu’est-ce qui vous a motivé à laisser aller vos bonis puis toutes vos primes?
M.S : Parce que je pense que la Caisse est une institution québécoise énormément importante. Donc c’est un honneur pour moi d’essayer de faire une contribution à la croissance à la Caisse. Donc pour moi c’est quelque chose énormément important. (NDLR Désolé, aucun papier-mouchoir n’est fourni avec le texte.)
A.D : Alors…
M.S : Merci Madame
A.D : Ah vous allez chez Power Corp?
M.S : Oh c’est juste seulement pour un petit déjeuner.

Comme vous pouvez le noter, il est toujours possible de revenir à la technique de la supériorité lorsque celle du faux-semblant n’est plus pertinente.

Discussion
Bien sûr, certains vont croire que le comportement de Monsieur Sabia était approprié étant donné qu’il était attendu par des gens importants; il allait rencontrer le Québec Inc. À leurs yeux, son attitude cavalière sera justifiée par le fait qu’il n’avait pas le temps de répondre à une journaliste qui arrive à l’impromptue. Mais je suis désolé pour eux, ce n’est pas la bonne façon de voir les choses.

Un gestionnaire qui désire avoir du leadership auprès de ses subalternes se doit, avant toute chose, d’être accessible. Pour être un leader, un gestionnaire doit comprendre que la priorité, c’est de répondre aux questions et non pas d’aller voir ses amis.

Pour être un bon leader, Monsieur Sabia aurait dû ralentir le rythme afin que la journaliste n’ait pas à courir à ses côtés (NDLR D’ailleurs, c’est un manque de galanteries pour la gent féminine qu’il ne l’ait fait.). Il aurait également fallu qu’il prenne le temps de répondre à ses questions. Il aurait pu s’arrêter quelques minutes pour faire le point même si cela n’était pas prévu à son agenda. En ce sens d’ailleurs, le rôle du leader, c’est d’être apte à gérer les imprévues. La présence de la journaliste en était un. Il faillait réagir correctement.

Pourquoi répondre aux questions? Parce que c’est la crédibilité du gestionnaire qui est en cause. Parce que ce n’est pas pour 2 minutes de retard qu’une réunion va tomber à l’eau. Pour devenir un leader, il faut inspirer confiance. Un gestionnaire laconique passe pour quelqu’un qui a des choses à cacher. C'est vrai que sur ce point, Monsieur Sabia, tout comme le processus de sa nomination... Que disais-je!?!

Conclusion
Ce reportage est un excellent cours de leadership en ce qui à trait aux choses à ne pas faire. Je vous invite à le regarder de nouveau. Je suis certain que vous y trouverez d’autres techniques et attitudes que vous jugerez inappropriées pour un gestionnaire. Il y a d’ailleurs plusieurs points que je n’ai pas abordés afin que cette chronique ne ressemble à une encyclopédie! En fait, cette vidéo parle d’elle-même. Et si par hasard vous ne voyez rien d’irrégulier dans la façon de faire de Monsieur Sabia, je suis encore une fois désolé. C’est probablement que vous êtes passé maître dans les techniques de gestion.

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3 commentaires:

  1. Bonjour M. Lanthier,

    Excellent billet qui présente, effectivement, plusieurs comportements à proscrire si l'on aspire à être un leader inspirant et rassembleur. Par contre, je ne comprends pas votre dernière phrase qui laisse sous-entendre que les techniques de gestion encouragent ce genre de comportements. À moins que je ne saisisse pas bien votre allusion.

    J'aimerais vous entendre là-dessus car si ma première impression est juste je ne suis pas du tout d'accord avec vous sur ce point. Je sors justement d'un cours de relations publiques et soyez assuré que c'est plutôt le contraire qui y est enseigné.

    Salutations,

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  2. Bonjour Gestionnaire Borg,

    Merci de votre commentaire. Pour ce qui est des techniques de gestion, je m’excuse si j’ai semé un doute dans votre esprit. Je m’en excuse même si j’ai atteint mon but! Vous comprenez? En fait, ce n’est pas un hasard si mon blogue s’intitule Leadership! Avez-vous dit leadership?

    Vous mentionnez que vous sortez d’un cours où c’est le contraire qui est enseigné. J’en suis persuadé que ce n’est pas ce qu’on enseigne dans les cours de gestion. Le problème, ce n’est pas les cours. Le problème, c’est ce que font les gens une fois qu’ils ont complété leur cours avec leur diplôme en main!

    Remarquez, je ne voudrais pas avoir l’air de faire des généralités. Toutefois, semaine après semaine, j’alimente mon blogue à partir d’événements qui n’ont jamais fait contredire ma devise, Leadership! Avez-vous dit leadership? Autrement dit, il y a toujours un peu d’ironie dans mes écrits et surtout, il ne faut pas me prendre au pied de la lettre.

    Pour ce qui est de ma dernière phrase, …passé maître dans les techniques de gestion. Je faisais bien entendu référence aux techniques énumérés dans ma chronique soit, la technique du coup de vent, de la supériorité et du faux-semblant.

    Comme vous l’avez sûrement constaté, des techniques qui n’ont rien à voir avec ce qui est enseigné dans les universités. Sauf peut-être la grande université, celle de la vie! Et dans ce cas-ci, la vie professionnelle qu’on retrouve dans nombre d’organisations.

    J’ai pu lire sur votre blogue (http://gestionnaireborg.blogspot.com") que vous êtes gestionnaires depuis plus de 10 ans. J’ose croire que vous avez eu la chance de croiser des adeptes de l’une des techniques que j’ai décrites. Malheureusement, ils sont trop nombreux les gestionnaires qui sont passés maître dans les techniques de gestion.

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  3. Merci pour ces précisions. Je ne savais pas si je devais interpréter votre dernière phrase au premier niveau....votre réponse me fait apprécier davantage votre style. Bonne continuation!

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